Un étrange virus décime la population masculine des Etats-Unis, ce qui amène les femmes à occuper tous les postes à responsabilité de tous les échelons. Même la maison blanche est occupée par une femme. Les hommes ayant pratiquement disparus, c’est de fil en aiguille une société matriarcale et oppressante qui se met en place.
Les rapports hommes femmes inversés
Pour protéger les quelques mâles survivants, les femmes les parquent dans des camps, à l’abri d’une contamination ; Le narrateur est l’un d’eux ; C’est aussi le chercheur qui a réussit à identifier la maladie et qui est chargé de trouver un vaccin. Il se rendra compte petit à petit que la mouvance au pouvoir à Washington est globalement dans une tendance radicale féministe et qui ne voit pas d’un bon œil les efforts fournis pour enrayer l’épidémie. Le pouvoir central américain dérive doucement vers une dictature matriarcale ou les hommes passent du statut de protégés vers celui d’esclaves. Pourchassés, emprisonnés voir même violés. Un nouveau code de la famille est promulgué qui déchoit les pères de tous leurs droits et qui rétablit la polygamie, mais à l’avantage des femmes cette fois.
Une double critique
On l’aura compris, la bonne idée du livre c’est d’inverser complètement la situation et de chambouler en profondeur l’équilibre hommes /femmes en opérant un brusque retour de balancier au profit des dernières. L’enchainement et si logique et implacable, qu’on est même surpris que ce thème ne soit pas plus abondamment exploité dans la littérature ou le cinéma.
J’imagine ce qu’un homme pourrait ressentir à la lecture de roman… Il n’y a probablement pas de quoi aimer les femmes ! En tout cas, rien qui devrait inspirer une confiance aveugle entre les sexes. Ceci dit, Robert Merle a pris grand soin de rester mesuré et s’il donne à penser aux hommes, il y a dans son livre également matière à méditer pour les femmes. Mine de rien, l’auteur fait une critique assez forte sur les mouvements féministes, notamment les plus radicaux.
Un court extrait du livre
Pièce sans fenêtres à air conditionné. Boiseries de chêne à mi-hauteur. Au-dessus, les murs sont blancs avec une seule gravure représentant une scène de la vaccination antivariolique à Cuba en 1900. Moquette épaisse où, en entrant, j’ai enfoncé jusqu’aux chevilles. Gros siège confortable, où, sur un geste, je m’enfouis jusqu’aux hanches. Là-dessus, un long silence. Je suis ici pour parler, mais on n’a pas l’air de m’y inviter volontiers. La parole n’est pas une chose dont les grands de ce monde aiment se dessaisir : ils préfèrent s’écouter qu’écouter.
Les hommes protégés de Robert Merle
Au surplus, je m’en rends bien compte, je ne suis pas persona grata. Ni moi ni ce que j’ai à dire. On me laisse mijoter. Que je me pénètre bien, au départ, de mon insignifiance.
Ils sont là tous les trois, muets, de l’autre côté d’une table ovale dont la largeur anormale symbolise, je suppose, toute la distance entre le Pouvoir et le simple citoyen. J’ai l’impression, qui me rajeunit sans me plaire, de passer un examen. D’ailleurs, bien que je sois un neurologue confirmé et connu, il y a bien un peu de ça, et je me demande si je ne vais pas me faire recaler. L’ironie, c’est que ma carrière n’est pas en jeu et que je suis ici pour défendre l’intérêt général auprès des gens qui en ont la charge. Me font face trois hommes. Au centre, aussi massif et carré que l’architecture « fédérale fasciste » de HEW, le secrétaire d’État Matthews. A la droite de Matthews, Skelton, le directeur de la santé – santé qu’il n’a pas d’ailleurs, à en juger par son physique décharné. A la gauche du secrétaire d’État et le considérant avec un air de mépris, Cresby, un des brillants conseillers du président.