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l’île de Robert Merle

l’Île est largement inspirée de l’histoire réelle des révoltés du Bounty, qui au XVIIIème siècle se sont mutinés et se sont réfugiés sur l’île de Pitcairn après avoir sabordé leur navire. Accompagnés de Tahitien ils y fondèrent une petite colonie.

Robert Merle s’est volontairement affranchis des contraintes historiques et s’est basé sur l’histoire de la Bounty pour en tirer une véritable robinsonnade, ou on retrouve des thèmes qui lui sont chers : l’intolérance, l’organisation sociale et l’humanisme.

Après leur mutinerie, les marins s’établissent avec quelques polynésiens sur une île coupée du monde, afin d’échapper à la marine britannique (les mutinées sont pendus lorsqu’ils sont pris). Avec Brio robert Merle met en place une mécanique infernale ou l’utopie idyllique qui règne au début de l’histoire va se muer en une guerre fratricide.

Il démontre comment une société malgré un début sur des bases égalitaire se dénature a force d’intolérance et de méfiance réciproque. Les tensions entre les tahitiens et les anglais, de traditions et de cultures différentes s’installent progressivement. D’autant plus qu’elles sont attisées par le personnage de McLeod, véritable ver dans le fruit, et dont le racisme va peu a peu contaminé toute l’ile. C’est avec peine qu’on progresse vers ce qui semble inéluctable, l’affrontement des deux clans et la fin d’une vie insulaire ressemblant à une utopie.

Un court extrait du livre

Purcell traversa le gaillard d’avant en évitant de regarder les hommes. Comme chaque fois qu’il passait au milieu d’eux, il avait honte d’être si bien habillé, si bien nourri. Il se dirigea vers la proue et se pencha. Une belle moustache d’écume se dessinait de chaque côté de l’étrave. Le Blossom taillait de la route.

Il se retourna. Les hommes nettoyaient le pont dans un tintamarre de seaux. Il soupira, détourna les yeux, et les deux mains appuyées derrière son dos sur la rambarde, son regard embrassa le bateau. Une beauté ! Le soleil brillait à perte de vue sur la houle longue du Pacifique, et le Blossom, ses trois mâts penchés à bâbord, recevait par le travers une brise Sud-Sud-Est. Chaque lame qui passait sous sa coque la soulevait, et le Blossom, bien appuyé de toutes ses voiles contre le vent, s’élevait sur sa crête sans roulis et revenait sans à-coup dans le creux. Une beauté, pensa Purcell avec amour. De l’étrave à la poupe, tout était soigné, fini ; la coque, bien passante dans l’eau ; le gréement, neuf. Dix-huit mois plus tôt, en passant la Manche, le Blossom avait distancé un corsaire milouin. Purcell prêta l’oreille. Bien qu’une île fût proche, il n’entendit pas de cri d’oiseau. Sauf quand une
lame déferlait, l’océan était silencieux. Mais il y avait autour de Purcell ces bruits qui, par jolie brise, lui faisaient toujours plaisir : le choc des énormes poulies de bois, la vibration des haubans, et au-dessous de lui, derrière son dos, le passage de l’étrave dans l’eau, doux et continu comme une pièce de soie qu’on déchire.

Purcell regarda de nouveau les hommes. Il fut frappé une fois de plus par leur maigreur, se reprocha d’avoir trouvé du plaisir à admirer le Blossom, ses mains se crispèrent sur la rambarde, et il pensa avec colère : Ce fou !

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